exibições de letras 931

Hommes Liges Des Talus En Transe

Alan Stivell

Letra

    Il pleut sur les coqs de bruyère
    Il pleut sur les constellations de bouleaux blancs
    Il pleut sur les charrues matinales barbouillées de terre glaise
    Il pleut sur le pain chaud au sortir des fours visités d'un gros feu tranquille
    Il pleut sur le poitrail des chevaux rubiconds
    Il pleut à verse sur la pelouse des toits lacustres baignés de merles et de bouvreuils
    Il pleut sur les femmes obstinées à emplir les églises par l'entonnoir des porches
    Il pleut sur les planchers d'aiguilles de sapin sur l'escalier des mousses remuées de salamandres
    Il pleut sur le lac tranquille des âmes simples
    Il pleut sur les hommes lourds et muets

    Je m'éveille
    Et je m'assois sur les talus limpides
    Et je m'installe sur la fesse des montagnes de laine
    Et je compte
    Et je compte
    Las de l'exil
    J'approche de la table, le banc
    Et à la clarté des couteaux
    Je laisse plonger en moi les racines du pain

    Plus loin que les matins de globules rouges
    Plus loin que le sang caillé des bruyères où rament les éperviers
    Plus loin que les lièvres blancs et gris et que les cheminées qui reprennent haleine
    Plus loin que les courts matins d'hiver qui voient passer dans l'œil des enfants la caresse des étangs sauvages
    Plus loin que les chevaux qui hennissent rouge au cœur des patries effilochées
    Plus loin que la végétation des colères inextricables qui lancent leurs lianes parmi les hommes en démolition
    Plus loin que les migraines veloutées qui grattent et qui mordent
    Plus loin que les aurores boréales brûlées de banquises à la rencontre des pays de rosée
    Plus loin que les destins limés à ras de rotule
    Plus loin que la braise flambante de l'œil

    LE SILENCE
    Le champ clos du silence
    La fermentation du silence
    Qui butte contre les vitres

    Hommes je vous parle d'un temps qui nous appartenait plus
    Mais d'un temps artésien qui sourd au moindre coup de pioche
    Je vous parle du temps où l'on bâtissait les forêts
    Du temps où chaque fleur recevait des hommes le sel du langage
    Du temps où cette terre était hantée d'un peuple solennel
    C'était du temps où l'homme était un frère pour l'homme
    Où les hommes se disaient bonjour du haut de leurs collines
    Où les hommes chaque matin saluaient le lait de la pluie

    J'ai compté
    La rose du ciel vert
    Les nasillements d'hirondelles à ras de cheminée
    Les impulsions d'aubes feuillues chez les hommes qui naissent à eux-mêmes
    La dépossession d'une patrie entière


    Et au bout de l'océan
    Les cocons de nuit
    La course droite des sangliers
    La plainte des moissons moisies tramées d'insectes vidés
    Au bout de l'océan
    Les campagnes fugueuses et les villages en quinconce débordant du fatras des moissons
    Au bout de l'océan
    Le poil humide des chevaux de cristal
    Le corail des lavoirs et des sources
    Les chiens roux lisses de sommeil
    Au bout de l'océan
    La machine des bocages explosifs
    Les gradins de l'aurore parmi les arbres craquants
    Au bout de l'océan
    Le rire des sauterelles
    Le maquis des congres et des lamproies
    La connaissance ininterrompue de la mort
    Au bout de l'océan
    L'établissement des hommes lucides
    Inventant une patrie délibérée
    Dressant sur les promontoires des villes de pierre des animaux de chair
    Au bout de l'océan
    Les reflets battus d'oiseaux rares
    Le sifflement de la vapeur dans les poumons et les poignets tendus
    Au bout de l'océan
    La confusion des paroles et des gestes
    La Visitation d'étranges bêtes brûlantes agitées de soubresauts
    La Visitation massive de boules de feu

    JE TE CRIE PAYS
    Pour tes éblouissements d'yeux dardés
    Pour tes contrebandes de chaleurs farouches
    Tes généalogies engluées
    Tes granits poreux et glacés
    Je te crie pays
    Pour tes fouillis de luzerne à fleur de peau
    Tes pur-sang purulents qui verdoient de sulfure
    Tes murs d'écurie écrasés par le coups de pied des chevaux
    Pour vous tous qui êtes moi
    Ou plus encore
    Vous tous qui êtes plus que moi
    Et je vous entends tourbillonner dans la dérive des silences giclés
    ET JE CRIE

    Suicides mauves
    Derrière les persiennes clauses
    Enfants rachitiques que l'on repousse du bout du pied
    Hommes qui traversez la vie comme on traverse un long tuyau humide
    Paysans coagulés tronc à tronc conduisant de la voix les ruées des troupeaux
    Soleils que l'on dirige à bout portant contre le cœur des chevaux
    J'ai vu mourir dans la nuit blonde
    Les enfants couleur de nacre et les filles brunes surgies du lait
    J'ai vu tomber par touffes l'ardoise des toits inertes
    J'ai vu proliférer les marécages aux lèvres des collines
    Il faisait un temps de flammes vertes
    Un temps de poussière d'acier
    Un temps d'yeux germés
    Et j'ai vu sous les portières du Ponant
    S'effriter les enfants pâles et dilatés
    Lourds héritages de fatigue
    D'espoirs séquestrés
    De forêts en gestation
    Chroniques blettes de chanteurs vibrant dans la lumière des branches
    Pays de paille grise
    Pays d'humidité redoublant de violence
    Pays d'attente et d'éboulis
    Je contemple ce pays bâti de côtes et de criques
    Cerné de climats douceâtres
    Traqué de tourbes révolues
    Outrepassé de tumeurs pâles et de pustules
    Où il n'y a pas de place pour le paysan seigneur des terres immobiles
    Pour le prolétaire en usine combattant les négoces et les engrenages féroces

    Soudain nous prend en route
    Le mal taillé en coin
    Le mal qui vrille et qui taraude
    Le mal qui fore et qui perfore
    Le mal qui force chaque pore
    Le mal mèche de tarière
    Le mal douleur de vilebrequin
    LE MAL DU PAYS NATAL

    Mes frères, mes frères
    Hommes brûlants plantés d'épines
    Hommes tranchants à l'écoute des séismographes
    Hommes de mon pays et d'ailleurs
    Buvez aux geysers de l'humanité
    Appareillez pour de grands hommes lourds de justice
    Rassemblez vos propos acérés depuis la pulsation des estuaires
    Jusqu'aux profondeurs de l'étable
    Hommes simples assis dans votre étable fermée
    Hommes empêtrés de tabous et d'interdits
    Je vous entends pourtant crépiter dans les flammes dévorantes de l'esprit
    Hommes liges des talus en transe et des villages abandonnés
    Hommes brodés urinant le long des fossés
    Hommes de vieilles candeurs célébrant des divinités aux joues roses et fanées
    Et vous aussi, hommes des villes collectionneurs de meubles et d'ustensiles
    Hommes émaciés pourrissant sur la muqueuse des villes étrangères
    Vous partagez nos démangeaisons de liberté
    Hommes puissants disputant la sérénité de l'orgue et des esplanades
    Hommes croustillants héritiers de toutes lèpres et de toutes famines
    Hommes trop humiliés les poings fermés de fureur
    Terrés dans le tanin de vos chairs meurtries

    Il n'y a pas de passé en Bretagne
    Seulement un imperceptible mouvement des lèvres
    Au détour de petites phrases anodines et friables
    Seulement un présent de grossières en justice
    Un avenir barré de violence et de poussière
    Il n'y a pas de passé en mon pays
    Sinon un bourdonnement d'hommes réfractaires
    Je revois les genêts sur l'urine sèche
    Les manoirs de quartz entourés de haies

    Mais je ne peux m'asseoir longtemps dans l'herbe
    Les déportations massives continuent
    Nous avons chaud à nos fleuves
    Nous avons chaud à nos relents d'alcool
    Nous sommes un peuple hauts fourneaux
    Un peuple coulé d'aubépine
    Nous ne capitulons pas

    Je m'arrête près des herses et des rouleaux
    Je mâche mes premières pousses de liberté
    J'ouvre l'éventail des champs labourés
    Et notre peuple accompli soudain des révolutions étincelantes à la face du monde
    Un peuple vaincu s'exerce au maniement des marées montantes
    Je les vois qui s'assemblent tous sur les places
    Bûcherons de l'aube arrimés aux cotres du soleil
    Défricheurs herbus et ruminants jetant les grappins dans un passé interdit
    Ecoliers ternes et appliqués établissant soudain des relations de cause à effet
    Ouvriers analogues s'éveillant avec lenteur au creux des faubourgs crispés
    Grappes de femmes lourdes enracinées dans la douleur des hommes
    Ouvriers en grève exigeant droit de regard et de pression sur les tubulures du pays
    Colleurs d'affiches, vendeurs de journaux, distributeurs de tracts, porteurs de pancartes
    Etudiants insolents et nerveux se dérobant avec véhémence
    Aux haleines fétides, aux visages craquelés
    Ecoliers rieurs éprouvant du pied le fragile équilibre de l'eau et du feu
    Syndicalistes vingt fois licenciés aux gestes robustes d'hommes mesurant l'éternité
    Paysans matraqués à bas de leur tracteur qui le soir sortent les livres précieux sur la table
    Vous êtes la Bretagne qui vient au feu
    Vous êtes la Bretagne qui s'ouvre aux vents du monde
    Aujourd'hui je vous le dis
    Nous allons procéder à des glissements de terrain
    Il y aura des sursauts de lumière dans le brouillard des solitudes
    Et l'angle des fenêtres écumera de fougères
    Alors, nous nous installerons dans l'odeur des charpentes et le soulèvement des toitures
    Pour des émeutes de tendresse
    Aujourd'hui je vous le dis
    Un peuple nouveau émerge lentement qui se ménage des moissons exemplaires
    Un peuple nouveau se dégage des siècles gluants
    Ce pays chloroformé
    Ce pays bruissant d'espoirs clandestins
    Rouvre les yeux sur les banlieues surmarines
    Que naissent en moi les pluies câlines
    Pour humecter les campagnes polychromes
    Que saignent les fougères fripées pour le plaisir des hommes qui tâtonnent
    Qu'éclatent les bouches captives de mon peuple enfanteur d'hirondelles
    Que se redressent les maisons arrachées à la matrice des frondaisons liquides
    Que s'éveille mon peuple aux quatre coins du monde matinal


    Comentários

    Envie dúvidas, explicações e curiosidades sobre a letra

    0 / 500

    Faça parte  dessa comunidade 

    Tire dúvidas sobre idiomas, interaja com outros fãs de Alan Stivell e vá além da letra da música.

    Conheça o Letras Academy

    Enviar para a central de dúvidas?

    Dúvidas enviadas podem receber respostas de professores e alunos da plataforma.

    Fixe este conteúdo com a aula:

    0 / 500

    Opções de seleção